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Je me souviens de ces années soixante, j'étais alors un enfant, quand j'allais durant quelques jours chez grand-père et grand-mère, à la campagne, dans le petit village de « La Tâcherie ». A l'évocation de ce nom, les souvenirs se bousculent dans ma tête, tellement ce furent des instants privilégiés dans mon existence.

Aujourd'hui je suis un quinquagénaire grisonnant et rien que de me remettre en mémoire ces moments de vacances enfantines, je redeviens alors ce petit garçon qui parcourait les près et les vignes et qui a grandi au rythme des saisons, s' « identifiant » à la vache ruminant dans l'étable, au canard nageant dans la mare, au bonhomme de neige planté dans la cour de la ferme, à l'hirondelle gobant les mouches, à la nature qui s'éveille, à l'hiver qui engourdi, à grand-père pêchant l'anguille ou chassant le faisan, à grand-mère trayant les vaches ou essuyant la vaisselle. De tendres souvenirs qui ont bercé mon enfance, forgé mon âme et que je me plais aujourd'hui à raconter.

La Tâcherie, un village plein de vie à une époque où la terre rémunérait ses bienfaiteurs qui l'adoraient, la toilettait pour qu'elle soit belle, bonne et que naissent dans ses entrailles les meilleurs légumes et les plus beaux fruits et que vendanges et moissons nourrissent le paysan et sa progéniture. Terre bénite, maudite dès fois quand elle décidait de contrarier son protecteur.

Bienfaiteur, protecteur. Des mots que je trace en pensant à cet homme qui les incarne tant. Je veux parler de Tonton Raymond, cet enfant né dans les parfums fumants des sillons, ce terrien dont le cœur et l'âme sont issus des profondeurs de cette terre qu'il chérit sans mesure, sa confidente, sa complice, sa raison d'être.

Tonton Raymond, la terre et la vie, trois mots qui ne font qu'un. Tonton Raymond, ce poète à la plume paysanne, ce conteur d'histoires d'antan, ce témoin d'un temps révolu où les saisons dictaient leurs lois, sans contrepartie, ce repère que l'on voudrait à tout jamais garder, ce sang qui coulent dans nos veines, ce bienfaiteur et ce protecteur dont la générosité, la bonté et l'amour n'ont jamais fait défaut.

Tonton Raymond que les vicissitudes de l'existence ont façonné, sans toutefois altérer cette affection et cet amour qu'il a toujours manifestés à ses trois neveux, prolongement viscéral empreint d'une connotation paternelle quand il s'est agi d'aider la famille plongée dans le malheur.

Tonton Raymond, l'apprivoiseur de pies et le berceur de poules,
Tonton Raymond, le malicieux et le besogneux,
Tonton Raymond, l'artiste poète qui compose dans les vignes,
Tonton Raymond, l'acteur qui se produit tous les jours dans le grand théâtre de la nature,
Tonton Raymond, le conducteur privilégié du tracteur D.22

C'est vrai, quand je pense à ces années où j'étais enfant, des séquences me reviennent en mémoire. Même si elles sont un peu floues, sans doute à cause du temps qui s'est écoulé et qui m'a fait adolescent, adulte et aujourd'hui me conduit au seuil du troisième âge, elles sont de plus fortes !!

N'empêche qu'il demeure en moi ces images que je viens d'évoquer et surtout ces tendres et doux souvenirs d'une période où j'étais certes insouciant, mais que j'ai quand même gravés dans ma mémoire.

C'est pour moi un bonheur extrême que de pouvoir repasser quelques-uns de ces clichés et de te dédier, Tonton Raymond, ces modestes lignes tracées tout spécialement pour toi à l'occasion de tes quatre-vingts printemps.


Quelques mots, quelques lignes puisés dans les profondeurs de mon cœur... De tout petits riens... mais de vrais bonheurs qui ont fait mes racines et auréolé ma tendre enfance.