Octobre offre aux forêts leurs nouvelles teintes pour la saison.rendezvousouslalune
Dans les vertes prairies vallonnées qui s'étirent à perte de vue,
Les troupeaux broutent l'herbe tendre caressée par les derniers rayons.
Fresque grandiose pour le promeneur qui vient des grandes cités et des longues rues.

Les burons, plantés dans cet univers verdoyant rassurent.
Ils sont les témoins vivants d'une époque pas si lointaine
Où les hommes, pour survivre, travaillaient dur.
De vrais bergers qui partageaient le labeur entre montagne et plaine.

L'ombre envahit peu à peu la terre et assombrit le paysage.
Des corbeaux attardés sillonnent les airs dans le calme du soir,
Un soir d'automne où la forêt prend un tout autre visage,
Celui d'un théâtre où le rideau va se lever pour le plaisir de l'auditoire.

Le ciel n'est qu'une myriade d'étoiles. La nuit s'installe dans la clairière.
Une légère brise emprunte de froidure fait tressaillir le spectateur.
La lune argentée diffuse sa lumière sur le plateau des Monédières.
Le public est impatient. Les animaux vont apparaître et faire battre les cœurs.

Le grand cerf est là. Il sort des coulisses du bois et avance lentement.
Il est beau, majestueux, le poitrail en avant et la tête dressée vers les cieux.
Les lignes de son corps se profilent sur la crête. Moment magique à vivre intensément.
Le tableau est fascinant, image de rêve, récit de conte, régal pour les yeux.

Le seigneur de ces lieux est immobile. Ses grandes et belles cornes en font un roi.
Le silence est profond. L'animal regarde la lune et lance son appel,
Un son rauque qui envahit la nuit, un cri lugubre et beau à la fois,
Une invitation pour des amantes et des âmes seules en quête de plaisirs charnels.

Puis, semblables à l'écho, d'autres mâles, dispersés, enchaînent, de concert.
L'homme, malgré le froid et le vent, est transporté dans un autre monde.
Les biches ont rendez-vous avec la lune. Le cerf brame et ses cris emplissent l'air.
Une princesse à la robe chamoisée tente une approche mais préfère poursuivre sa ronde.

Nuit de convoitise, nuit de plaisirs, nuit de désirs, nuit d'amour, nuit de brames,
Où les cris succèdent aux cris pour former une étrange symphonie,
Une douce mélopée composée de séduction, de puissance et de flammes,
Un feu d'amour pour le cœur des biches, un duel pour les mâles ennemis.

L'homme est assis sur le tronc de l'arbre. Il doit bouger et lutter contre le froid.
Il aimerait tant prolonger ces instants. Son esprit vagabonde sous la voûte étoilée.
Il se sent soudain proche de ces êtres, si purs, si fragiles qui ne connaissent qu'une loi,
Celle de la nature et de la vie qui se gagne ou se perd à coup de cornes, à coup de pieds.

Le spectateur se lève. Au dessus de la forêt, il suit des yeux l'étoile du berger.
Le grand cerf est toujours là. Il sent la présence de l'homme et s'enfuit dans la lisière.
Le rideau se referme sur la scène. Le témoin va partir. Les acteurs vont rester.
Les brames résonnent sous la lune. Une nuit étoilée d'octobre où les cœurs sont ouverts.

Marc GANRY