Un voile de brumes enveloppe la vallée
Et annonce, dès matin, une belle et chaude journée.
L'air est doux et la nature sort de sa nuitée.
Déjà les oiseaux gazouillent et se déplacent à grandes envolées.

Le ruisseau murmure et les truites, entre les rochers, dansent..
Dans la bergerie, les brebis affamées réclament leur pitance.
Elles savent que l'herbe verte est rare. La chaleur de l'été est intense..
Alors il faut bien petit-déjeuner. Ici, du foin en abondance.

Le maître du troupeau est déjà parmi ses protégées.
Levé dès les premières lueurs du jour, c'est un habitué.
Il aime ses bêtes. Elles sont sa famille, sa propriété.
Il les cajole, il leur parle et leur souhaite une bonne journée.

A leur tour, telle une classe d'enfants, les brebis saluent leur bienfaiteur.
Délicieux instant, tendre complicité, moment de bonheur
Pour le petit pâtre qui est accueilli avec tant de chaleur.
L'homme et les bêtes ne font qu'un. C'est le cri du cœur.

Dehors, les premiers rayons caressent les coteaux endormis.
La campagne s'éveille. Premiers aboiements, premiers cris.
Le chien est déjà là, gesticulant et impatient. Il est le protecteur de ses brebis.
C'est le compagnon du berger, son confident, son fidèle ami.

Le gardien est intrépide. Dans un moment, comme un chef, il s'imposera.
Il conduira ses moutons sur les versants. Dans les près, il les surveillera.
C'est un amour de chien, fier de sa fonction, autoritaire de son état.
Il fera régner l'ordre. Si manquement il y a, il sanctionnera.

C'est la sortie du troupeau. Les clochettes tintent au cou des animaux.
Les bêlements heureux emplissent la vallée. C'est la bousculade pour les agneaux.
Patrimoine vivant, richesse des montagnes et des vallées. Symbole pour l'écolo.
Victimes des cours mondiaux, ils sont trop souvent menacés de disparaître du tableau.

Le chien veille. Les brebis paissent une herbe trop brûlée.
Les agneaux s'ébattent autour de leur mère pour une courte tétée.
Les moutons, qui ont quitté leur manteau laineux trop chaud pour l'été,
Sous l'œil du gardien, broutent en rêvant à une pâture moins séchée.

Le berger, appuyé sur son bâton, est immobile, telle une statue.
Sa musette dans le dos, il toise son troupeau pas encore repu.
Son rêve, être pâtre des montagnes dans les alpages, vastes et vertes étendues.
Il envie ce jardin de verdure, parsemé de tant de fleurs, si fraîche, l'ombre venue.

Le gardien du troupeau rappelle à l'ordre quelques brebis dissipées.
Le pâtre, encore dans ses pensées revient alors à la réalité de sa vallée.
Sûr qu'il aurait pu être ouvrier d'usine ou faire un autre métier.
L'amour des moutons, le partage de la nature et sa soif de liberté l'ont poussé à être berger.

Peu à peu le soleil brûlant perd de sa brillance.
Les premières ombres envahissent la vallée et donnent plus d'aisance.
L'heure de rentrer à la bergerie approche, le pâtre s'avance.
Il donne des ordres à son gardien et vers la ferme les moutons s'élancent.

L'eau du ruisseau coule limpide et déborde de fraîcheur.
S'y désaltérer, quelle aubaine, quelle joie après tant de chaleur.
Les brebis et les agneaux le savent et s'y délectent avec bonheur.
Le chien les regarde s'abreuver. Il boira au ruisseau tout à l'heure.

Dans la bergerie, les derniers nés, trop petits pour l'aventure
Tètent leurs mamans, toutes dévouées à leur progéniture.
Les retrouvailles sont un concert. Les bêlements battent à nouveau la mesure.
La journée se termine et la soirée rafraîchit la nature.

Le berger est heureux. Il aime cette vie.
Il l'a désirée et la partage, en toute tranquillité entre agneaux et brebis.
Il sait qu'il n'ira pas dans les verts alpages. Ce n'était que rêverie.
Il restera dans la vallée, celle qui l'a vu naître, celle qui le chérit.


Marc GANRY