Dis, grand chêne, raconte-moi des histoires,
Toi qui a vécu et possède un corps bien musclé.
Tu dois en avoir plein la mémoire,
Des anecdotes, oh ! Seigneur des forêts.

Oui, mon enfant, je suis presque centenaire,
Et ma tête va bien malgré mon grand âge.
Tu sais, j'en ai vu des joies et des misères,
J'en ai traversé des ouragans et des orages.

J'ai connu beaucoup de tes ancêtres.
Petit, ils m'ont soigné, protégé et adoré.
Ils ont fait de moi un grand maître.
Aujourd'hui, je suis fier d'être autant vénéré.

Durant les très chaudes heures de l'été,
L'herbe est fraîche sous mes branches feuillues.
J'y ai vu, il y a de ça bien des années,
Ton papi Jean soulever le jupon de sa tendre Lulu.

Tout près de moi, dans la poussière du chemin,
Les villageois allaient et venaient d'un bon pas.
Les chars à bancs affluaient le dimanche matin.
Le jour du Seigneur, c'était le confort et la joie.

Plus jeune, je jouais avec ton papa.
Sur mes solides bras, il bâtissait des cabanons,
Lieux secrets quand il invitait la petite Olga,
Un refuge pour se laisser aller à la méditation.

Tu sais mon garçon, j'ai connu la guerre.
Sous mon ombre, les soldats chantaient et riaient.
Dans ma chair et mon âme, j'ai beaucoup souffert.
Sous la mitraille, trois innocents, à mes pieds, sont tombés.

Mon enfant, tu vois, le soleil se cache dans le soir.
Je parle et ta jeunesse me donne des ailes.
Demain, je te raconterai de nouvelles histoires,
Des anciennes, mais aussi de très belles.

Marc GANRY